L'affaire des Couts

 

        Depuis le 15ème siècle un litige concernant le territoire des Couts, appartenant à la Baronnie d’Arros mais  en dehors du fief composée des paroisses d’Arros et Bosdarros, entre les Barons d’Arros et les communautés de Saint Abit , Pardies et Baliros est régulièrement remis entre les mains de la justice. Cet acte notarié résume assez bien toutes les étapes judiciaires jusqu’à un accord passé en 1848 qui semble enfin mettre fin à quatre siècles de procès mettant à l’occasion  une nouvelle fois en avant des anciens droits seigneuriaux de l’ancien régime des Barons d’Arros qui manifestement n’ont pas tout à fait disparu longtemps après la nuit du 4 aout 1789 et l’abolition des privilèges.

7 décembre 1848

         Par devant nous Jean Honorat Duclos notaire à la résidence de Nay, arrondissement de Pau, en présence des témoins bas nommés, ont comparu ;

        D’une part, Monsieur Henri d’Espalungue, propriétaire agissant tant en son nom qu’au nom et comme se portant fort pour Mademoiselle Caroline d’Espalungue aussi propriétaire , les deux demeurant à Arros et de Madame Marie Olympe d’Espalungue épouse de Monsieur Elie Jean d’Encausse de Labatut demeurant à St Andres propriétaire, ses sœurs.

           D’autre part, Monsieur Louis Claverie maire de la commune de Saint Abit y demeurant, procédant en cette qualité au nom de la dite commune assisté de Sieur Raymond Peyroulet cultivateur, membre du conseil municipal de la même commune y demeurant aussi , le dit Sieur Maire autorisé aux fins ci-après par délibération du dit conseil municipal en date du cinq décembre courant.

  Lesquels comparants ont dit : que Mr d’Espalungue et ses deux sœurs possédant dans le territoire des trois communes de St Abit, Pardies et Baliros une grande étendue de terrain en nature de bois et fougeraies connu sous le nom des Couts. Mr d’Espalungue aux noms qu’il agit prétend que les dites communes n’ont sur ce terrain des Couts que de simples droits d’usage ainsi que plusieurs titres l’établissent. Notamment ;

     1° Une sentence de la cour major en date du dix neuf aout 1450 qui casse une décision du sénéchal qui déclare que le terrain des Couts est une dépendance des patrimoines de la Baronnie d’Arros. En conséquence adjuge au Seigneur d’Arros la propriété des Couts en réservant seulement aux communes des droits d’usage sur le terrain adjugé.

    2° D’une autre sentence du conseil souverain de Béarn en date du neuf septembre 1557 que le terrain des Couts était une dépendance de la Baronnie d’Arros, que le Seigneur était en droit de percevoir les droits seigneuriaux sur les terres affiévées avec droit exclusif de faire des pignorations.

   Que cette sentence réserve encore aux sus dites communes la jouissance paisible de leurs droits d’usage. Qu’en exécution de cette sentence le territoire des Couts fût borné et le Seigneur d’Arros fut autorisé à mettre en culture cent vingt arpents de terre ainsi que cela résulte des actes d’affièvement des 14 mai 1614 et 4 avril 1687

   Que postérieurement à cette sentence les trois communes bornèrent et partagèrent le terrain des Couts, chacune exerça ses droits d’usage sur la partie située dans son territoire.

   Qu’à la fin du 16ème siècle, le Seigneur d’Arros fit faire une coupe de bois sur le terrain des Couts. Les communes de pardies et de Baliros se pourvurent devant le Parlement de Pau prétendant que le Seigneur d’Arros n’était pas propriétaire des Couts qu’il n’avait que la directe comme Seigneur et que dans tous les cas, les coupes commencées portaient atteinte aux droits d’usage des communes. Le Parlement renvoya la cause devant celui de Toulouse qui rendit le 6 avril 1778 un arrêt qui maintient le Sieur d’Espalungue en la propriété du terrain appelé des Couts et les communautés de Pardies et Baliros aux droits et facultés que leurs accordaient sur le dit terrain les sentences de 1450 et 1557 ci-dessus relatées.

   Que depuis cet arrêt Mr d’Espalungue jouit du terrain des Couts sur lequel il avait ouvert des carrières qu’il exploitait seul et sans trouble de qui que ce fut. Lorsque la commune de St Abit vint en troubler la possession mais par trois jugements rendus par la justice de paix du Canton de Nay en l’an 4, Mr d’Espalungue fut maintenu dans la possession des biens qu’il possédait au territoire des Couts et notamment des carrières

   Qu’il parait qu’en l’an 1779 des difficultés s’étaient élevées entre les communes de St Abit et Mr d’Espalungue sur la manière dont devait être payer la rente stipulée dans les contrats d’affièvement de 1614 et 1697 ci-dessus énoncées mais ces difficultés furent terminées par l’arrêt rendu par le Parlement de Pau de 3 juillet 1779 qui ordonna que la redevance serait payée en plein avec la mesure de Nay.

   Qu’en l’année 1793 la commune de Saint Abit assigna Mr d’Espalungue devant le tribunal de Pau pour être déclaré propriétaire des Couts fixé dans son lot lors du partage fait avec les communes de Pardies et Baliros , et que Mr d’Espalungue fut condamné à restitué les jouissance qu’il avait retirées pendant vingt neuf années du terrain des Couts.

   Que cette instance ayant été abandonnée par la commune de Saint Abit, feu Mr d’Espalungue en demanda la perception qui fut prononcé par jugement du tribunal civil de Pau en date du premier juin 1827 confirmé sur appel par arrêt de la Cour rendu le neuf mars 1830.

   Qu’en l’année 1841 Mr d’Espalungue et ses sœurs affermèrent verbalement les carrières pratiquées sur les Couts , les fermiers s’occupèrent à extraire des dites carrières de la terre et des pierres et en faisant cette extraction ils déracinèrent quelques chênes que la commune de Saint Abit prétendait avoir plantés sur le bord du creux de la carrière. Le garde forestier de la commune dressa des procès verbaux les 12 mars et 11 mai 1841 en vertu desquels l’administration forestière assigna les fermiers devant le tribunal correctionnel pour les faire condamner aux peines de droit et en dommages-intérêts.

   Que Mr d’Espalungue et les Demoiselles , ses sœurs intervinrent dans l’instance et prirent le fait et cause de leurs fermiers en demandant le renvoi au civil qui fut prononcé par jugement rendu le 2 juillet 1841.

   Qu’en vertu de ce jugement et de l’autorisation obtenue par le conseil de Préfecture, Mr d’Espalungue et les Demoiselles ses sœurs engagèrent l’instance civile le 22 décembre 1841 et assignèrent la commune de Saint Abit en la personne de son maire devant le tribunal.

      1° Pour être déclarés propriètaires de la partie des Couts situés dans le territoire de Saint Abit.

    2° Que les droits de la commune de Saint Abit soient restreints à de simples usages 3° Pour qu’ils soient admis à racheter les droits d’usage rachetables et à cantonner les droits consistant dand l’usage en bois.

   Que sur cette instance intervint par un jugement le 23 avril 1842 dont le dispositif est de la teneure suivante ; 

  « Le tribunal sans s’arrêter à choses dites , la commune de Saint Abit à la prescription par elle apposée et de tout la déboutant , déclare Monsieur et le Demoiselles d’Espalungue propriétaires du terrement des Couts situés dans la commune de Saint Abit et du terrain sur lequel ont été faites les extractions et coupes constatées par les procès verbaux du garde de la commune de Saint Abit et avant de statuer sur la demande en rachat et en cantonnement formée par les parties admet les dites parties à prouver sur les lieux contentieux, devant M. Casaubon président à ces fins commis ,que plus de trente ans avant les procès verbaux dont s’agit, elle ont exclusivement joui des carrières existantes sur le terrain des Couts et que la commune de Saint Abit n’y a exercé aucun droit quelconque, la preuve contraire reservée à la partie de l'arret , ordonne l’exécution provisoire du présent jugement, non obstant l’appel. »

    Que la commune de Saint Abit ayant interjeté l’appel de ce jugement, il fut confirmé par arrêt de la Cour de Pau du 3 avril 1846.

  Que pendant l’instance d’appel les parties ayant fait procéder à l’enquête et contre enquête il en est résulté que M. et Mesdemoiselles d’Espalungue de leurs auteurs avaient joui exclusivement des carrières existantes sur le terrain des Couts plus de trente ans avant les procès verbaux dressés par le garde de la commune de Saint Abit .

   Que M. d’Espalungue et ses sœurs étaient au moment de donner suite à leur demande en rachat et en cantonnement par eux formée, lorsque M. le Maire de Saint Abit leur a demandé d’en terminer ça à l’amiable pour éviter les frais énormes que cette demande occasionnerait . M. d’Espalungue et ses sœurs par un sentiment de générosité et de bon voisinage ont bien voulu accéder aux propositions de Monsieur le Maire de Saint Abit en abandonnant à la généralité des habitants de la commune la presque totalité de l’immense terrement appelé des Couts, dont ils sont seuls propriétaire en vertu des jugements et arrêt sus relatés et qui ont acquis l’autorité de la chose souverainement jugée. En conséquence les parties ont fait le traité suivant qui ne sera définitif qu’après avoir été approuvé par le conseil municipal de la commune de Saint Abit et successivement par le conseil de Préfecture ; savoir Monsieur d’Espalungue aux noms qu’il agit aura pour ses parts sur le Couts

      1° Tout le terrain en nature de bois, taillis appelé Darré Labède Laspeyrères porté sous les numéros 495, 497, 507 et 514 du plan parcellaire confrontant du levant à terre de Péhustet, de d’Espalungue et au chemin public ; du midi à terre de Laragnouet d’Arros, de Sallanabe cabriolet de Saint Abit et de d’Espalungue, du couchant à chemin public, terre de Bernardet et du nord à terre de Bonnemazou . L e dit terrain de contenance de 4 hectares 83 ares et 70 centiares .

      2° Une contenance de quatre hectare de terrain en nature de fougeraie à prendre à suite du touya de M. d’Espalungue ; le dit terrain porté sous les numéros 204,242,243,244,245,247,248 et 249 du plan parcellaire confrontant du levant et midi à terre de la commune d’Arros, du couchant à terre de Mr d’Espalungue et du nord la terre de Mr de Livron, de Cassoudessale et de Carrère de Saint Abit.

     3° Une portion de terrain en nature de bois de contenance de 10 ares 30 centiares à prendre au nord-ouest du parc du château confrontant au sud est au dit parc au levant au ruisseau le Luz, couchant et nord à ruisseau Larriou.

   Tout le surplusdu dit terrain les Couts appartiendra à la commune de Saint Abit pour la remplir de tous les droits d’usage et de coupe qu’elle y avait en vertu des titres plus haut rapportés pour en disposer comme propriétaire .Le dit traité est fait aux conditions suivantes ;

     1° Que la commune de Saint Abit payera à Monsieur d’Espalungue dans une année de ce jour une somme de mille francs avec l’intérêt à cinq pour cent et ce pour le remboursement des faux frais exposés dans le cours du procès.

    2° Qu’elle sera tenue d’acquitter tous les frais de première instance et d’appel montant à la somme de 1459 francs 14 centimes, au paiement desquels frais elle sera tenue de satisfaire à tout instant.

    3° Qu’elle sera tenue aussi de faire clore à ses frais et dépens la contenance de quatre hectares de terrain en nature de fougeraie avec des fosséset tertres. Elle paiera encore tous les frais des présentes.

    4° Que la dite commune ne pourra en aucun temps ni raison ouvrir aucune carrière sur le terrain les Couts, soit qu’elle exploite soit qu’il vienne à être partagé, cette convention est expresse et substantielle, sans elle le présent traité n’aurait pas eu lieu.

   Enfin, il est convenu que Monsieur le Maire fera à tout instant les démarches nécessaires pour faire approuver le présent traité soit par le conseil municipal de Saint Abit, soit par le conseil de Préfecture et l’autorité supérieure.

             Dont acte fait et passé au château d’Arros le sept décembre 1849 en présence des Sieurs Bernard Paris dit Lahon et pierre Patdous fils, les deux d’état de laboureur demeurant à Arros, témoins sousignés avec les parties et nous notaire après lecture faite.

Affaire à suivre ici bientôt

 

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